Publié
le 25/08/2008 par EmmanuelMARQUET
«C’est bien simple, même quand le pétrole baisse à nouveau, comme ces
dernières semaines, la fréquentation de notre site augmente.» Frédéric Mazzella,
PDG de Comuto, qui édite le site Covoiturage.fr, en est convaincu : le boom du
partage de voiture est une tendance de fond, que la flambée des carburants n’a
fait qu’amplifier cet été. Il annonce 700 nouveaux inscrits par jour sur son
site ces temps-ci, contre 300 en janvier. Son concurrent, 123envoiture.com,
affiche 30 % d’inscrits en plus depuis le début de l’année.
Décollage. Alors que le
concept est né dans les années 70, la France s’est lancée assez tard dans le
covoiturage, comme le souligne une étude du Certu (1) qui fait remonter à 2000
le début de l’engouement et à 2005-2006 le vrai décollage. «Trois facteurs sont
venus s’additionner, explique Thomas Herlin, qui a fondé il y a onze ans
Covoiturage.com. Le prix du pétrole bien sûr, mais aussi le développement de
l’Internet haut débit et la prise de conscience écologique.»
Celle-ci
est l’un des arguments de promotion du covoiturage. Evidemment, c’est toujours
une voiture qui roule mais «il permet de réduire le nombre de véhicules
circulant sur les voies publiques, il en augmente le taux d’occupation
(aujourd’hui inférieur à 1,3 en ville) et contribue ainsi à une réduction de
l’émission des gaz à effet de serre», précise le Certu. Faute d’étude précise,
les professionnels du secteur estiment, un peu à la louche, que 500 000 à 600
000 Français le pratiquent, au moins occasionnellement. Si la majorité d’entre
eux a moins de 35 ans, «le profil est en train de s’élargir, au-delà du trajet
ponctuel longue distance, typiquement étudiant», constate Thomas Herlin.
Résultat, les principaux sites préparent des versions plus «professionnelles»
pour la rentrée, plus proche du site de voyage que du forum de discussions.
Car il n’y aura sans doute pas de place pour tout le monde sur ce marché
: le Certu a comptabilisé plus de 70 sites l’an dernier, mais pour Olivier Kuhn,
d’123envoiture, qui revendique la plus large base d’abonnés, «c’est un peu comme
pour les services de renseignement en 118, seuls trois ou quatre vont vraiment
émerger». Et la différence se fera surtout sur la taille de la base de données,
d’où une bataille de chiffres entre les principaux opérateurs.
Vitrine.
Car cette base est aussi une vitrine qu’ils ont intérêt à soigner : si le
service de mise en relation grand public, la plupart du temps gratuit, rapporte
peu (via la publicité sur les sites), cette base d’abonnés est un produit
d’appel pour vendre des services de covoiturages ciblés aux entreprises et aux
collectivités. Car l’avenir est aussi au ciblage de plus en plus précis des
usagers (par entreprise, collectivité, campus…)
En se développant, le
covoiturage quitte peu à peu ses origines alternatives pour devenir une offre de
service encadrée. Frédéric Mazzella résume : «Notre ennemi numéro 1, c’est
l’autostop. C’est anonyme, on ne sait pas sur qui on tombe. Et c’est gratuit.»
(1) Le Covoiturage en France et en Europe, Centre d’études sur les
réseaux, les transports, l’urbanisme et les constructions publiques (Certu),
octobre 2007. GUILLAUME LAUNAY QUOTIDIEN : lundi 25 août 2008
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