publié le 10 octobre 2008
Le projet de loi Marleix fera la part belle à l'intercommunalité. Le secrétaire d'Etat aux Collectivités l'a confirmé lors de la 19e convention nationale de l'intercommunalité, évoquant entre autres la compétence "droit des sols" pour les communautés d'agglomération et certaines communautés de communes. L'ADCF acquiesce mais appelle à d'autres avancées, notamment sur l'élection des élus communautaires.
En
marge de la 19e convention nationale de l'Assemblée des communautés de
France (ADCF), le nouveau président de l'association, Daniel Delaveau,
confiait le 9 octobre que l'élection au suffrage universel direct des
conseillers communautaires prévue par le projet de loi d'Alain Marleix
ne constituait pas, à ses yeux, le volet le plus important du texte.
L'essentiel se situe selon lui plutôt du côté des outils de
consolidation de l'intercommunalité. Les espoirs du nouveau chef de
file de l'ADCF n'ont pas été déçus le lendemain. Venu clore les débats
de la convention, le secrétaire d'Etat aux Collectivités territoriales
a bien sûr confirmé le principe de l'élection au suffrage universel
direct à partir de 2014 des élus communautaires sur le même bulletin de
vote que les conseillers municipaux. Mais il a aussi a annoncé une
série de mesures visant à consolider l'intercommunalité.
"Vous avez été entendus", a déclaré Alain Marleix aux 1.300 élus et
agents territoriaux présents. Comme l'avait demandé l'ADCF dans son
livre blanc dévoilé l'année dernière, les dernières communes pas encore
rattachées à une communauté (aujourd'hui 8% des 36.700 communes)
devront imiter les autres. Et ce avant le 1er janvier 2014. Au-delà de
ce délai, le préfet interviendra. Autre annonce allant dans le sens des
attentes du mouvement intercommunal, les fusions de communautés seront
possibles même en cas de refus d'une d'entre elles, "selon un mécanisme
reposant sur l'obtention de conditions de majorité qualifiée". Alain
Marleix a indiqué : "Mon objectif est de favoriser la réalisation de
projets actuellement en sommeil faute de consensus entre les candidats
pour un projet." Par ailleurs, "un rééquilibrage raisonnable permettant
une représentation des communes et des EPCI dans les mêmes proportions"
au sein de la commission départementale de la coopération
intercommunale devrait être réalisé. Enfin, le gouvernement "fera des
propositions au Parlement" pour encourager la création de "services
communs" entre les communes et l'EPCI dont elles sont membres, "qu'il
s'agisse de services fonctionnels ou même de services techniques".
Toutes ces dispositions intégreront le chapitre 3 - lequel sera
spécialement dédié à l'intercommunalité - du projet de loi de
modernisation de la démocratie locale qui sera présenté début 2009 en
Conseil des ministres.
Transfert de l'urbanisme
Alain Marleix a aussi promis aux communautés de nouvelles
compétences. "A l'image des communautés urbaines qui détiennent déjà
des compétences de plein droit en matière de plan local d'urbanisme",
la compétence du droit des sols sera étendue aux communautés
d'agglomération et aux communautés de communes de plus de 50.000
habitants - "c'est un début", a indiqué le secrétaire d'Etat. Les
conseils municipaux seront "associés" à cette compétence "pour la
partie du territoire qui les concerne".
D'autres mesures, que n'a pas évoquées le secrétaire d'Etat, pourraient
figurer dans son texte de loi, comme la modification des règles de vote
lors du transfert des compétences statutaires. Alors qu'aujourd'hui un
vote favorable des deux tiers des communes représentant au moins 50% de
la population est requis, la règle pourrait être demain celle de la
majorité simple.
Ces mesures donnent bien entendu satisfaction aux responsables de
l'ADCF. Mais pas complètement. Les élus intercommunaux veulent aller
plus vite et plus loin. Le 10 octobre, Daniel Delaveau appelait à la
"consécration du rôle de l'intercommunalité au sein de notre République
décentralisée". Parmi les demandes de l'ADCF figure par exemple le
transfert des pouvoirs de police correspondant aux compétences de
l'intercommunalité ou encore la suppression totale du système du
panachage pour les élections actuellement en vigueur dans les communes
de moins de 3.500 habitants et qu'Alain Marleix souhaite conserver pour
les communes de moins de 1.000 habitants. En outre, l'élection des
conseillers communautaires suivant le modèle en vigueur à Paris, Lyon
et Marseille (dit "PLM") ne convainc pas l'ADCF. "Le PLM est l'option
la plus consensuelle, car elle respecte le cadre communal", confie le
vice-président de l'ADCF et maire d'Orléans, Charles-Eric Lemaignen.
Mais pour lui, un scrutin type PLM stricto sensu ne permet pas d'ouvrir
un débat sur les projets communautaires. "Le cadre communal ne suffit
pas, conclut-il. Il faut que chaque liste communale soit affiliée à un
projet communautaire."
Thomas Beurey, à Montpellier
2009 sera l'année du chantier de la clarification des compétences
des collectivités. Suite au discours prononcé par le chef de l'Etat le
25 septembre à Toulon, une commission présidée par l'ancien Premier
ministre Edouard Balladur fera d'ici l'été 2009 des propositions au
gouvernement. Le secrétaire d'Etat aux Collectivités locales l'a
confirmé devant les élus intercommunaux réunis à Montpellier pour la
19e convention nationale de l'ADCF. Cette commission, a précisé Alain
Marleix, sera composée de représentants des principales forces
politiques et d'un certain nombre de personnalités qualifiées. A la
lumière des travaux de la commission, le gouvernement préparera un
projet de loi dans le courant de l'été 2009. Au coeur des enjeux, il y
a selon le secrétaire d'Etat, "la meilleure imbrication entre les
départements et les régions". L'objectif, précise-t-il est de
"faciliter la vie des citoyens", de "clarifier les compétences" en
"s'inscrivant dans la logique du rapport Lambert". Autrement dit, la
clause générale de compétences des départements et des régions pourrait
en fin de course être remise en cause. Mais dans tous les cas, "il
n'est pas question qu'en l'état on supprime le département", a prévenu
Alain Marleix. Au cours d'un débat final sur l'organisation
administrative territoriale, les responsables de l'ADCF se sont tous
accordés sur le fait qu'il fallait agir et vite.
Très applaudi, le président d'honneur de l'ADCF, Marc Censi, a déclaré
que selon lui l'avenir appartenait au "couple magique" constitué par la
région et le bloc local (communes et leurs groupements). Faut-il alors
supprimer le département ? Non, répond l'élu. "Le département a des
coeurs de métier que personne ne lui conteste", a-t-il expliqué.
"Cependant, il faut lever la clause générale de compétences et tout se
simplifiera", a conclu Marc Censi. Certains, comme Michel Piron,
souhaitent une réforme plus radicale aboutissant à une "hiérarchisation
entre les collectivités".
Dans la salle, le député-maire de Vervins, Jean-Pierre Balligand, a mis
en garde les élus : "La disparition du département, c'est un leurre,
c'est la région qui va disparaître : on ne va pas faire des pôles
européens attractifs en départementalisant les régions !" Tonnerre
d'applaudissements.