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Titre du blog : L'URBANISTE QUI TENTE L'URBANISME DURABLE
Auteur : urbaniste
Date de création : 23-08-2008
 
posté le 30-10-2008 à 08:05:57

Développement durable: où en est la France? (in ALTERNATIVES ECONOMIQUES.fr)

Développement durable: où en est la France?

L'Hexagone devrait respecter le protocole de Kyoto. Mais il reste loin derrière ses voisins dans de nombreux autres domaines. En matière d'énergies renouvelables ou de fiscalité verte, par exemple.

En matière de développement durable, comment situer la France vis-à-vis de ses voisins européens et des autres pays développés ? Impossible de répondre d'une manière simple à cette question en la plaçant sur un podium ou en queue de peloton. Tout dépend des indicateurs et des sujets. Grâce au nucléaire, l'Hexagone a des émissions de CO2 rapportées à son produit intérieur brut (PIB) parmi les plus faibles d'Europe, et il devrait être l'un des cinq pays européens à atteindre les objectifs fixés lors du protocole de Kyoto. Mais cette bonne performance a un revers: la surproduction nucléaire a découragé pendant longtemps les investissements dans les économies d'énergie et dans les énergies renouvelables, deux secteurs où la France fait largement moins bien que la moyenne de ses voisins.

Dans le domaine de la santé, elle arrive première dans le classement de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Mais elle est également dans le peloton de tête pour le nombre de cancers par habitant en Europe, dont 8 % à 20 % s'expliquent par des facteurs liés à l'environnement. Des tendances contradictoires que l'on retrouve aussi du côté des entreprises, si tant est que la notion d'entreprise française ait encore un sens lorsqu'on parle des géants du CAC 40... Les constructeurs automobiles français ont ainsi les taux d'émission de CO2 par véhicule les plus faibles en Europe, car ils sont bien positionnés sur le marché des petites citadines. Inversement, les banques françaises sont largement à la traîne lorsqu'on compare leurs engagements en matière de responsabilité sociale et environnementale à ceux de leurs homologues étrangères.

Un début d'inflexion

Que disent les évolutions les plus récentes ? Depuis que le développement durable semble être devenu un objectif partagé par les grandes entreprises et les partis de gouvernement, la situation évolue-t-elle dans le bon sens ? Quelques signaux montrent un début d'inflexion: les rejets industriels dans l'eau et l'air ont considérablement diminué grâce aux normes adoptées dans les années 80. Les zones couvertes par des dispositifs de protection de la biodiversité n'ont jamais été aussi nombreuses. Dans les grandes agglomérations qui ont investi dans les transports en commun, comme Lille, Lyon ou Reims, la part de la voiture dans les déplacements recule, preuve que cette politique est efficace.

Par ailleurs, depuis 2004, la quantité de CO2 émise par les transports diminue, signe que l'augmentation du prix du pétrole couplée aux progrès techniques peuvent être efficaces. Dans l'industrie, la hausse du prix de l'énergie et le système européen de quotas d'émissions ont incité les entreprises à investir dans l'efficacité énergétique. Elles utilisent donc aujourd'hui moins d'énergie en valeur absolue qu'en 1996 pour produire davantage de richesses.

Mais ces résultats sont totalement insuffisants si on les ramène par exemple à l'objectif proposé par le Giec (le groupe de scientifiques spécialistes du climat qui a reçu le prix Nobel de la paix en 2007), et adopté formellement par la France en 2005, de diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2050 au regard de leur niveau de 1990. Cet objectif, dit "Facteur 4", est considéré comme indispensable pour contenir l'évolution du climat dans un plafond de + 2 degrés, niveau dont les conséquences sont jugées maîtrisables par le Giec. A cette aune, nous n'avions fait en 2006 qu'un tiers du chemin nécessaire puisque nos émissions étaient inférieures de 4 points aux objectifs de Kyoto, mais supérieures de 7 points au scénario Facteur 4.

L'importance des politiques publiques

Dans ce contexte, comment faire mieux ? Tout d'abord, en prenant exemple sur les bonnes pratiques de nos voisins. Ainsi, l'Allemagne recycle 68 % de ses déchets municipaux, quand nous nous contentons de 32 %; la part de l'agriculture biologique atteint 11 % en Autriche (contre 2 % en France), grâce à une politique de soutien à la conversion que rien ne nous empêche de mettre en place; le Danemark a instauré une taxe sur l'ensemble des consommations de carbone et est devenu ainsi le pays où la part de la fiscalité verte dans l'ensemble de la fiscalité est la plus importante d'Europe, ce qui n'est sans doute pas étranger à ses bons résultats en matière d'isolation des logements ou d'efficacité énergétique de son PIB. Pour autant, il n'existe, malheureusement, pas de modèle à suivre car aucun pays européen n'a une empreinte écologique jugée soutenable dans le long terme.

 

L'Etat du développement durable en France

Pour que chacun puisse participer de manière mieux informée au débat public, un nouvel Alternatives Economiques Pratique vient de paraître sur "L'Etat du développement durable en France". En douze chapitres thématiques (climat, transports, énergie, consommation...) et plus de 150 graphiques, cartes et tableaux commentés, ce guide permet de savoir où en est la France et de la situer vis-à-vis de ses voisins européens.


Parler du développement durable dans un pays donné a-t-il un sens quand il s'agit d'une question globale par excellence ? De nombreuses politiques publiques relèvent déjà du niveau européen et international, comme le marché du CO2. Pour autant, ce qui se fait en France peut avoir un impact mondial.


De plus, nombre de sujets clés pour le développement durable, tels que la lutte contre l'étalement urbain ou la prévention des cancers liés à l'environnement, relèvent encore principalement du cadre national. La mondialisation des enjeux ne peut donc pas être une excuse pour ne pas exercer au mieux localement cette responsabilité centrale pour notre avenir individuel et collectif.

Pour faire mieux qu'aujourd'hui, la France doit jouer sur les trois leviers que sont la responsabilité individuelle, l'offre des entreprises et les politiques publiques. La production d'un kilogramme de veau engendre douze fois plus d'effet de serre que celle d'un kilogramme d'oeufs, et la production de blé bio 85 % de moins d'effet de serre que du blé conventionnel. Nos choix quotidiens de consommation ont donc bien un impact sur le climat, et ils ne peuvent (ni ne doivent) être dictés par les pouvoirs publics. Ils relèvent d'abord de notre responsabilité personnelle.