A l’image d’un certain Don Quichotte de La Manche, les opposants à l’énergie éolienne semblent accuser de tous les crimes et tous les maux ce qui ne se révèle être que de simples moulins à vent!
« Les éoliennes… D’affreux moulins à vent qui défigurent nos campagnes »
Loin de partager cette opinion très subjective, la large majorité des Français cultive une image très positive de ces nouveaux moulins à vent. Ainsi 79% des personnes interrogées se disent favorable à la production d’énergie éolienne dans leur région. Et il y a mieux : 62% des sondés accepterait l’implantation d’un champ éolien à moins d’un kilomètre de leur domicile ! Décidément, les lobbies anti-éoliens peinent à trouver un public dans une population sensibilisée à la cause des énergies renouvelables…
« L’énergie éolienne produite par ces moulins à vents coûte plus cher qu’elle ne vaut ! »
Actuellement l’Etat français soutient le secteur de l’énergie éolienne et impose à EDF de racheter l’électricité produite à 82 euros/MWh. Ce décret nourrit la harangue des anti-éoliens qui ont tôt fait de crier au scandale : la filière éolienne ne serait pas rentable et les consommateurs feraient les frais de cette lubie du gouvernement pour les moulins à vents… En réalité, si l’on considère la hausse constante du prix de l’énergie et des matières premières, le prix du kilowattheure éolien pourrait bien être rejoint par le tarif standard dès 2009…
« Ces moulins à vents représentent une nuisance pour les hommes et pour la nature ! »
L’intolérable nuisance sonore que produirait le
bruit du vent sur les pâles des éoliennes a longtemps été l’un des
arguments phare des détracteurs de l’énergie éolienne…
Curieux quand l’on sait que selon la réglementation en vigueur, les
maisons environnantes ne peuvent être exposées à plus de 3 décibels la
nuit et 5 décibels le jour – moitié moins que le
bruit émis par la chute d’une feuille morte –. Quant aux amis de la
gent ailée que ces moulins à vent devaient décimer, qu’ils se rassurent !
Une récente étude des chercheurs de l’Université de Newcastle révèle que les moulins à vent modernes ne représentent qu’un risque négligeable pour les oiseaux des champs…
La biodiversité est un enjeu majeur, qui n'a pas reçu toute l'attention qu'il mérite. Les décisions prises jusqu'à aujourd'hui ont été timides, et ne correspondent pas à l'approche globale de préservation qui s'impose alors que nous traversons la sixième grande crise d'extinction des espèces depuis le début de la vie sur terre. La présente note formule sept propositions d'actions concrètes, pour assurer une protection efficace des espèces.
L’effondrement actuel de la biodiversité n’a pas reçu l’attention qu’il mérite de la part des décideurs et du grand public, alors qu’il s’agit d’une crise préoccupante pour l’avenir de l’humanité. Les espèces animales et végétales disparaissent à un rythme au moins 100 fois supérieur au rythme naturel d’extinction. Les causes de cet effondrement sont connues et directement liées à l’activité humaine. Or les écosystèmes sont indispensables et leur bon fonctionnement ainsi que leur stabilité dépendent de la diversité biologique. La disparition d’espèces provoque un déséquilibre toujours grandissant des écosystèmes ; comme une aile d’avion dont on enlèverait un à un les rivets, c’est tôt ou tard l’ensemble du système qui s’effondre.
Les réponses
politiques à cette crise ont été jusqu’à présent tardives et
excessivement timides. Malgré un objectif affiché ambitieux, la France
ne s’est guère donné les moyens d’enrayer le problème. Après trois ans
de mise en œuvre, le bilan de la « Stratégie nationale pour la
biodiversité » est très décevant. Le « Grenelle de l’environnement »
aurait pu être l’occasion d’une remobilisation. Malheureusement, le
projet de loi « Grenelle 1 » reste particulièrement flou sur les moyens
financiers et les conditions de mise en œuvre des mesures envisagées.
L’outil majeur de préservation de la biodiversité inscrit dans la loi
est l’élaboration d’une « trame verte et bleue » mais elle a perdu sa
principale force puisqu’il n’est plus précisé que cette trame sera
opposable aux grands projets d’infrastructure (voir la note de Terra
Nova « Grenelle de l’environnement : la révolution écologique n’aura
pas lieu »publiée le 29 juin 2008).
Les acquis
récents de la recherche conduisent à porter un regard nouveau sur la
diversité biologique. Nos connaissances actuelles disqualifient en
effet toute stratégie du type « arche de Noé ». Un petit nombre
d’espèces ou de sites remarquables même parfaitement protégés ne
sauraient être considérés comme des réservoirs de biodiversité pour
l’ensemble de la planète. La seule stratégie efficace pour stopper
l’effondrement de la biodiversité doit donc porter sur l’ensemble de la
nature « ordinaire », parallèlement aux mesures de protection des zones
« extraordinaires ». Il convient donc d’adopter une approche globale de
préservation et d’utilisation durable de la biodiversité en intégrant
de manière effective cette préoccupation dans l’ensemble des secteurs
d’activité.
Nous formulons pour cela sept propositions d’actions concrètes :
- Apporter le soutien politique et les moyens nécessaires à une mise en œuvre effective de la « Stratégie nationale pour la biodiversité »
- Instaurer une évaluation systématique de l’impact environnemental de chaque dépense fiscale ou subvention publique, existante ou à l’étude, quels que soient son origine ou son champ d’application
- Mieux prendre en compte la biodiversité dans les investissements publics et conditionner l’octroi de certaines aides et subventions au respect de critères environnementaux
- Traduire en actes le principe pollueur-payeur en revalorisant certaines écotaxes favorables à la biodiversité
- Assurer la mise en œuvre effective d’une trame verte et bleue opposable
- Repenser la donne institutionnelle entre l’Etat et les collectivités territoriales
- Se donner les moyens de préserver la biodiversité au delà de nos frontières, en renforçant la prise en compte de la biodiversité dans les règles et le fonctionnement de l’OMC et en soutenant la création d’un organisme international d’expertise scientifique sur la biodiversité (initiative IMoSEB).
L’effondrement actuel de la biodiversité est considéré par les scientifiques comme une crise aussi grave que le changement climatique pour l’avenir de l’humanité. Le constat fait l’objet d’un consensus scientifique : les espèces animales et végétales disparaissent à un rythme au moins 100 fois supérieur au rythme naturel d’extinction. Dans son rapport 2007, l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature indique qu’un mammifère sur 4, un oiseau sur 8, un tiers des amphibiens et 70% des plantes sont en péril. Les scientifiques estiment que la destruction des forêts tropicales à elle seule provoque la disparition d’environ 27 000 espèces par an, soit une toute les 20 minutes. De plus, l’ampleur et la rapidité du réchauffement climatique en cours vont soumettre les espèces végétales et animales à un véritable défi adaptatif dans un environnement déjà fortement dégradé. Il en résultera probablement une forte accélération des extinctions d’espèces si l’augmentation de la température moyenne devait dépasser le seuil des 2°C. Nous sommes donc entrés dans une 6ème grande phase d’extinction de la vie sur Terre, mais pour la première fois c’est l’Homme, et non des phénomènes naturels, qui en est la cause. Nous savons en effet par l’étude des fossiles que cinq grandes phases d’extinction se sont produites au cours des derniers 500 millions d’années. La plus récente, causée il y a 65 millions d’années par une pluie de météorites au Mexique, a sans doute mis fin à l’ère des dinosaures. L’évolution a ensuite lentement généré une nouvelle biodiversité sur des millions d’années.
Les
causes de l’effondrement actuel de la biodiversité sont connues et
directement liées à l’activité humaine : surexploitation (pêche
intensive, commerce d’espèces protégées), pollutions (de l’air, de
l’eau et des sols), fragmentation et destruction des habitats
(étalement urbain, infrastructures, défrichement et déforestation),
introduction d’espèces invasives (accélérée par la mondialisation des
échanges) et changement climatique. Or nous sommes totalement
dépendants à bien des égards du bon fonctionnement des écosystèmes (cf.
annexe 1 « Pourquoi sauvegarder la biodiversité ? »). Les biens et
services qu’ils fournissent sont en effet une contribution
indispensable au fonctionnement de nos économies et au bien être des
populations. La disparition d’espèces provoque un déséquilibre toujours
grandissant des écosystèmes ; comme une aile d’avion dont on enlèverait
un à un les rivets, c’est tôt ou tard l’ensemble du système qui
s’effondre.
La
France a une forte responsabilité vis-à-vis de la préservation de la
biodiversité. En effet, le territoire métropolitain est au carrefour de
4 des 7 régions biogéographiques européennes et héberge 40% des espèces
de plantes et 80% des espèces d’oiseaux présentes en Europe. Les
territoires français d’outre mer hébergent 26 fois plus d’espèces de
plantes et 60 fois plus d’espèces d’oiseaux que la métropole. La France
contient ainsi 5 des 25 « hot spots » de biodiversité (zones très
riches en biodiversité et très menacées répertoriées par l’UICN) et se
situe parmi les 10 pays hébergeant le plus grand nombre d’espèces
végétales et animales menacées d’extinction au niveau mondial. La
France dispose de la 2ème Zoné économique exclusive. Elle a donc
responsabilité particulière sur les espaces marins et océaniques. De
par ses activités commerciales et de coopération, la France a aussi un
impact direct sur la biodervité en dehors du territoire national.
Lors
du sommet de Johannesburg en 2002, la communauté internationale s’est
fixée comme objectif de freiner significativement l’érosion de la
biodiversité d’ici 2010. La France et l’Union européenne ont adopté un
objectif plus ambitieux consistant à stopper cette érosion au même
horizon. La France s’est dotée en 2004 d’une « Stratégie nationale pour
la biodiversité ». Celle-ci rassemble les actions déjà engagées par la
France en matière de protection de la nature, et en propose de
nouvelles autour de quatre grands axes : mobiliser tous les acteurs ;
reconnaître au vivant sa valeur ; prendre en compte la biodiversité
dans toutes les activités et politiques sectorielles ; et mieux
connaître la diversité du vivant.
Après trois ans de mise
en œuvre, le bilan de la Stratégie est très décevant et a été dénoncé
par les associations de protection de la nature. La France ne consacre
que 1% de son territoire à la protection poussée de la nature (parcs
nationaux et réserves). Faute de volonté politique et de moyens, la
mise en œuvre du réseau européen Natura 2000 en France a pris un retard
très important et n’a pas permis la prise de conscience et la
mobilisation autour de l’enjeu de la biodiversité. Seule la mise en
demeure envoyée par la Commission européenne en 2004 pour insuffisance
de désignation de sites Natura 2000 a permis un faible développement du
réseau qui couvre aujourd’hui 12% du territoire (ce qui place la France
en queue de peloton européen : 20ème position sur 25 pour la directive
Oiseaux et 22ème pour la directive Habitats). Lorsque les plans
d’action de la Stratégie nationale pour la biodiversité ont été mis en
place (trois n’ont jamais vu le jour), ils se sont contentés de mesures
minimales, sans moyens humains et financiers pour leur suivi ni
échéancier de mise en œuvre. La prise en compte de la biodiversité dans
les politiques publiques ne s’est traduite que par des tensions entre
le ministère de l’écologie et les ministères de l’équipement ou de
l’agriculture, sans changements des pratiques les plus impactantes et
avec des arbitrages quasi-systématiquement défavorables à la protection
de la nature (OGM, agrocarburants, pesticides, quotas de pêche,
programme autoroutier, etc.)
Le Grenelle de
l’environnement aurait pu être l’occasion d’une remobilisation sur ce
sujet pour une véritable politique en faveur de la biodiversité.
Malheureusement, le projet de loi « Grenelle 1 », adopté par le conseil
des ministres le 11 juin 2008, reste particulièrement flou sur les
moyens financiers et les conditions de mise en œuvre des mesures
envisagées. L’outil majeur de préservation de la biodiversité inscrit
dans la loi est l’élaboration d’une « trame verte et bleue » (cf.
annexe 2) mais elle a perdu sa principale force puisqu’il n’est plus
précisé que cette trame sera opposable aux grands projets
d’infrastructure.
Les
acquis récents de la science conduisent à un profond changement de
regard sur la diversité biologique. C’est l’ampleur insoupçonnée de la
diversité des espèces et la faible connaissance que nous en avons qui
frappent d’emblée : 1,7 millions d’espèces ont été inventoriées à ce
jour alors que l’on évalue leur nombre total entre 10 et 100 millions.
De plus, la diversité du vivant ne se réduit pas à la variété des
espèces. On sait aujourd’hui que la diversité des individus au sein
d’une même espèce (diversité intra-spécifique) et la diversité des
écosystèmes (diversité supra-spécifique) jouent un rôle majeur. La
vision statique de milieux naturels en équilibre pourvu qu’on les
soustraie à toute perturbation a également été remise en cause par les
scientifiques au profit d’une approche dynamique qui s’intéresse aux
trajectoires d’évolution des espèces et des écosystèmes en maintenant
des conditions favorables et en préservant leurs capacités
d’adaptation. Ces éléments et concepts sont présentés de manière plus
détaillée en annexe 3 (« Acquis récents de la recherche en matière de
biodiversité »).
Ces nouveaux acquis scientifiques ont des
conséquences importantes sur les stratégies de préservation et les
politiques publiques à mettre en œuvre. Ainsi, le nouveau regard que
les scientifiques portent aujourd’hui sur la diversité du vivant
disqualifie toute stratégie du type « arche de Noé ». La préservation
d’un petit nombre d’espèces clés se heurte en effet d’emblée à la
difficulté de les choisir correctement compte tenu de nos connaissances
très lacunaires. Si ont ne doit pas renoncer à une telle approche, il
est toutefois certain qu’elle ne permet qu’imparfaitement de prendre en
compte la diversité intra-spécifique ni la diversité des écosystèmes.
Enfin, la nécessité d’une approche dynamique de la gestion de la
biodiversité exclut une stratégie qui limiterait les capacités
d’adaptation des espèces et des écosystèmes aux changements. Pour les
mêmes raisons, les zones très riches en biodiversité (réserves
intégrales, coeur de parcs nationaux, hotspots) doivent impérativement
continuer à être protégées pour leur haute valeur patrimoniale, mais ne
sauraient être considérées comme des réservoirs de biodiversité pour
l’ensemble de la planète.
Il
est temps d’agir. Nous savons l’urgence de la crise. Nous avons les
connaissances scientifiques et les moyens techniques pour la juguler.
Une politique publique efficace de sauvegarde de la biodiversité passe
par un objectif et cinq propositions d’actions.
La
seule stratégie efficace pour stopper l’effondrement de la biodiversité
doit porter sur l’ensemble de la nature, et non seulement sur la
préservation de hotspots de biodiversité. Cela est d’autant plus
nécessaire que les services écologiques indispensables en un lieu donné
sont et seront fournis pour l’essentiel par la biodiversité qui s’y
trouve aujourd’hui et qui y évoluera dans des conditions favorables.
Cette action tous azymuts doit en particulier porter sur la réduction
des facteurs de « pression » sur la biodiversité.
Pour
préserver la nature ordinaire, les logiques de type « arches de Noé »
sont inopérantes, celles des « sanctuaires » insuffisantes. Il convient
d’adopter une approche globale de préservation et d’utilisation durable
de la biodiversité en intégrant de manière effective cette
préoccupation dans l’ensemble des secteurs d’activité (agriculture,
urbanisme, transports, énergie, etc.). C’est le sens de la Stratégie
nationale de la biodiversité, pourvu qu’elle jouisse du soutien
politique et des moyens juridiques et financiers indispensables à sa
mise en œuvre.
La
fiscalité représente en effet un important levier d’action. Or
aujourd’hui le rapport entre dépenses fiscales favorables et
défavorables à l’environnement est de 1 pour 8 (PLF 2007). Cela est dû
aux nombreuses activités à fort impact environnemental négatif qui
bénéficient d’exonérations d’impôt. Un rééquilibrage rapide et un
renversement à moyen terme de cette situation est indispensable. Pour
cela nous proposons une évaluation systématique (aujourd’hui
inexistante) de l’impact environnemental de chaque dépense fiscale ou
subvention publique, existante ou à l’étude, quels que soient son
origine ou son champ d’application.
Plus généralement la
Revue générale des prélèvements obligatoires devrait prendre en compte
l’instauration d’une véritable fiscalité écologique qui serve à la fois
les objectifs de la lutte contre le changement climatique et de la
préservation de la biodiversité.
L’audit proposé
précédemment et d’autres travaux d’évaluation environnementale devront
déboucher sur la modification des décisions d’investissement, aides
publiques et exonérations dans un sens plus favorables à la
biodiversité. On peut d’ores et déjà pointer les pistes suivantes :
-
Mise en place d’un « 1% biodiversité » (sur le modèle du « 1% paysage
développement ») pour toute construction d’infrastructure (transports,
énergie…). La politique du « 1% paysage développement » concerne les
grandes infrastructures autoroutières et vise à maîtriser les effets
induits par l’infrastructure tout en promouvant les valeurs naturelles
des paysages et à participer au développement cohérent et durable des
territoires. De manière analogue, un versement fonction du coût des
travaux pourrait être envisagé pour chaque construction
d’infrastructure (transport, énergie…) au profit de la préservation de
la biodiversité ordinaire.
- Réorientation des subventions
agricoles grâce à la modulation (article 69 du règlement du Conseil)
que la France est l’un des rares états membres à ne pas utiliser et qui
permet de prélever jusqu’à 10% de l’enveloppe du premier pilier de la
PAC pour soutenir « des types particuliers d’agriculture qui sont
importantes pour la protection ou l’amélioration de l’environnement »
-
Offrir la possibilité aux collectivités locales d’exonérer de Taxe
Foncière sur les Propriétés Non Bâties (TFNB) les espaces naturels à
statut de protection strict et les terres cultivées en agriculture
biologique
- « Verdir » la Dotation Globale de Fonctionnement
des collectivités : moduler le montant de la DGF selon que les communes
sont ou non incluses dans les Schémas de Cohérence Territoriale,
étendre le cinquième critère dont bénéficient actuellement les communes
situées dans le cœur de parcs nationaux (Loi Parcs d’avril 2006) aux
zones bénéficiant de protections réglementaires (Natura 2000, réserves
naturelles, sites classés, etc.), moduler la dotation proportionnelle à
la superficie avec des taux différents selon l’importance écologique
des espaces
- Conditionner l’octroi des aides au logement
ou à la construction au respect de critères environnementaux :
efficacité énergétique et critères minimaux de densité notamment.
-
Déplafonnement au-delà du seuil actuel de 2% de la Taxe Départementale
sur les Espaces Naturels Sensibles (TDENS) : elle sert au financement
de la politique départementale de protection, de gestion et d’ouverture
au public des espaces naturels sensibles
- Déplafonnement de
la Taxe sur les Passages Maritimes. Cette taxe est due par les
entreprises de transport public maritime. Elle est assise sur le nombre
de passagers embarqués à destination d'un site protégé et perçue au
profit du gestionnaire de cet espace. Son plafond actuel à 1.52€ est
sans commune mesure avec l’impact environnemental de ces flux maritimes
et prive les gestionnaires d’espaces côtiers protégés de ressources
déjà rares
- Déplafonnement de la Taxe sur les Ouvrages
d’Art. Elle est due par les passagers de chaque véhicule terrestre à
moteur empruntant un ouvrage d’art reliant une île maritime au
continent. Elle sert sur les îles concernées au financement exclusif de
mesures de protection et de gestion des espaces naturels
-
Revalorisation de la Taxe Générale sur les Activités Polluantes sur
l’extraction de granulats. Elle est de 0,1€/t aujourd’hui, on pourrait
la porter à 0,4€/t au moins. Il s’agirait de refléter le coût des
dommages liés à la poussière, au bruit et à la modification des
paysages. A titre comparatif, la taxe similaire existant au Royaume-Uni
est de l’ordre de 2,5€/t.
- Mise en place d’une taxe sur les
canons à neige. Il s’agirait de faire contribuer les utilisateurs aux
dommages causés aux éco-systèmes locaux par ces dispositifs (pollution
de l’eau, pollution des sols et dégradation des paysages notamment)
-
Utiliser la fiscalité locale pour lutter contre l’étalement urbain. Par
exemple en permettant une modulation des taux selon que les
constructions sont situées au centre ville ou en périphérie. De
nombreuses taxes sont concernées : taxe locale d’équipement, taxe
départementale sur les espaces naturels sensibles, taxe foncière sur
les propriétés bâties et taxe d’habitation
- Généralisation et montée en puissance des mécanismes de compensation des dommages résiduels
Les
mesures économiques décrites ci-dessus devraient s’accompagner du
développement d’une véritable infrastructure permettant à la
biodiversité de faire face aux défis majeurs de la fragmentation des
espaces naturels, de la pollution et du changement climatique. C’est le
sens de la trame verte mise en avant lors du Grenelle de
l’environnement (cf. annexe 2), et qui vise à doter les collectivités
et l’Etat d’un nouvel instrument d’aménagement durable du territoire,
afin qu’ils puissent inscrire la conservation de la biodiversité,
notamment ordinaire, dans leur projet d’utilisation de l’espace. Le
caractère opposable de cette trame est indispensable à son efficacité
et à sa pérennité.
Repenser
les différents niveaux de responsabilité territoriale en matière de
protection de la biodiversité pour favoriser une meilleure articulation
entre les Régions (qui ont une petite partie des compétences en matière
de protection de l’environnement, surtout pour les outils de
planification), les départements et les communes qui s’y impliquent à
divers titres. Les régions devraient être « chef de file » de la
protection de l’environnement, en particulier dans sa dimension «
espaces naturels et biodiversité ». Des expérimentations pourraient
être lancées en confiant à quelques régions pilotes le soin de les
conduire, y compris en adaptant les lois et les règlements.
Outre-mer,
il conviendrait d’utiliser pleinement les facultés ouvertes par la
révision de la Constitution de 2003 et confier aux régions qui le
souhaitent la possibilité de fixer elles-mêmes les règles applicables
sur leur territoire en matière de protection de l’environnement.
Il
est indispensable d’élargir cette préoccupation de préservation de la
biodiversité nationale à toutes les conséquences internationales des
activités conduites en France et en Europe: commerce, coopération
internationale, migrations, exploitation des ressources des espaces
internationaux.
Au-delà des mesures qui sont à prendre à
l’échelle nationale, il est donc nécessaire de réinsérer la
biodiversité dans les mécanismes de la mondialisation. La France
devrait pour cela peser de tout son poids en faveur :
- de la possibilité d'inclure les effets de la déforestation ou de la non-déforestation dans les mécanismes de Kyoto II ou dans le champ d'application d'une taxe carbone mondiale ;
- de la mise en œuvre rapide de l’initiative IMoSEB : organisme international d’expertise scientifique qui serait à la biodiversité ce que le Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) est au changement climatique et fournirait aux décideurs des informations synthétiques faisant autorité ;
- de l’étude et de la mise en oeuvre de mesures dérogatoires aux règles de l'OMC pour protéger la biodiversité (par exemple contingentement ou surtaxation des bois ne faisant pas l'objet d'une exploitation raisonnée, interdiction importante des poissons des grands fonds, etc.) ;
- de la création d’une organisation des nations unies pour l’environnement (ONUE) qui constitue un véritable contrepoids à l’OMC et contribue à une réelle compatibilité entre les accords multilatéraux environnementaux et les règles du commerce international.
On
a longtemps eu une approche de cette question en termes de bien
marchand, d’espèce « utile », l’exemple de la découverte de substance
pharmaceutique chez les plantes tropicales étant souvent cité.
Or
des travaux récents, notamment le Millenium Ecosystem Assessment, ont
mis en évidence que ces biens marchands ne constituent qu’une faible
partie de l’ensemble des biens et services que fournit la biodiversité,
et ont insisté à l’inverse sur l’importance des services rendus par les
écosystèmes : services d’approvisionnement (alimentation,
pollinisation, énergie, etc.), services support (formation et fertilité
des sols, cycle de l’eau), service de régulation (régulation des
inondations, contrôle biologique des parasites) et services culturels
(valeurs spirituelles et esthétiques).
Le chiffrage
économique global des biens et services rendus par la biodiversité
reste difficile et sujet à controverse, mais des chiffres partiels
donnent déjà une idée de la contribution essentielle des services
écosystémiques à l’économie : par l’étude exhaustive de leurs
fonctions, le WWF a ainsi estimé en 2004 à près de 70 milliards de
dollars la valeur économique des 12.8 millions de km² de zones humides
recensées à l’échelle de la planète par la convention de Ramsar. La
contribution de la pollinisation par les abeilles au PIB américain a
été estimé en 2000 à 15 milliards de dollar par an. Il est clair, à
partir des exemples ci-dessus, qu’un effondrement de la biodiversité
pourrait saper les fondements mêmes de l’économie mondiale. Dans son
rapport publié en 2005, le Millenium Ecosystem Assessment montre que
deux tiers des services rendus par les écosystèmes sont dégradés au
niveau mondial avec des conséquences fortes, notamment pour les
populations les plus pauvres.
Les écosystèmes nous
fournissent donc quantité de ressources (céréales, fibres textiles,
poissons, molécules thérapeutiques, etc.) et leur bon fonctionnement
(fertilité des sols agricoles, absorption du CO2…) ainsi que leur
stabilité (atténuation des perturbations telles que crues ou tsunamis,
résistance aux maladies émergentes et aux invasions biologiques,
contrôle des ravageurs des cultures…) dépendent de la diversité
biologique. Or à chaque fois qu’une espèce s’éteint, cette disparition
est non seulement irréversible mais elle condamne également l’ensemble
des espèces qui lui sont liées (bactérie, champignons, lichens ou
insectes). Ces extinctions d’espèce provoquent un déséquilibre toujours
grandissant des écosystèmes.
Il
faut donc commencer par reconstituer le tissu vivant du territoire en
l’irriguant par une trame verte nationale. Il s’agit d’un réseau à
l’image du système sanguin, qui doit rétablir des flux entre des
organes vitaux – les zones de plus haute valeur écologique – de façon à
ce que vive tout l’organisme – c'est-à-dire le tissu vivant du
territoire. Rétablir des flux, consiste à rétablir des continuités ou
des proximités qui permettent aux espèces de circuler et d’interagir.
Pour cela, l’espace rural, les cours d’eau, les zones urbaines doivent
redevenir des espaces de vie pour la nature. Et les grands organes que
constituent les montagnes, les fleuves, les grandes zones herbagères et
forestières, le littoral sauvage doivent être préservés de la
fragmentation et même restaurés.
Cette trame verte nationale,
cohérente à l’échelle du pays et même du territoire européen, se
décline et se définit plus précisément localement grâce par un pilotage
coordonné des collectivités territoriales. Ainsi, identifier,
comprendre et inscrire le fonctionnement du réseau écologique d’un
territoire dans la politique et les documents d’aménagement et de
planification, permettra de :
- préserver la biodiversité et ses capacités d’adaptations aux changements climatiques,
- mieux accompagner les transformations du paysage, pour éviter une fragmentation supplémentaire ou irrémédiable liée à l’aménagement, à la banalisation ou/et à l’urbanisation de l’espace,
- resituer le territoire dans son environnement à plus large échelle et de favoriser la solidarité entre territoires.
En
somme, cette trame verte nationale doit constituer, avec les aires
protégées, l’infrastructure écologique du territoire sur laquelle doit
s’inventer un aménagement durable. Il s’agit d’éviter au maximum de
figer de façon irrémédiable l’occupation et la gestion de l’espace et
de permettre son évolution en reconnaissant et améliorant le rôle et le
fonctionnement des infrastructures naturelles qui composent le réseau
écologique du territoire.
Cette trame verte devra être simultanément accompagnée par :
- le réseau métropolitain d’aires protégées ;
- la création d’un réseau d’aires marines protégées représentatives de la diversité des écosystèmes côtiers et pélagiques ;
- la création d’un réseau d’aires protégées terrestres et marines en outre mer.
L’Etat doit donner une impulsion forte à cette dynamique et en faire une politique à part entière. Il s’agit de :
1.
Construire un cadre de référence national : dans toute appréhension
d’un réseau écologique se pose la question de l’échelle pertinente du
territoire, de sa cohérence avec les autres échelles infra et supra et
de sa confrontation aux autres projets d’aménagement. Une trame verte
nationale devrait être définie en cohérence avec le réseau écologique
paneuropéen d’une part et au sein des politiques sectorielles
d’aménagement et de gestion du territoire (transports, aires protégées,
agriculture, etc.) d’autre part.
2. Définir une compatibilité
à la trame verte des outils et des documents d’urbanisme, de
planification, de protection de l’espace.
3. Conditionner les financements des projets et pratiques de gestion du territoire au respect de la trame verte.
4.
Lancer un programme national (voire européen) de recherche sur le thème
des réseaux et corridors écologiques, beaucoup de questions d’ordre
méthodologique restent à étudier (échelles pertinentes, espèces à
cibler pour les indicateurs, cohérence des politiques), des
suivis-évaluations sont à mettre en place, la transférabilité aux
gestionnaires de l’espace à organiser.
Une fois les besoins
connus (cartes), l’objectif fixé (principe de continuité), il sera
possible d’intégrer la trame verte nationale dans les documents
d’urbanisme et de planification, voire de le rendre opposable.
Le
concept de biodiversité, ou diversité biologique, synthétise les acquis
de plus de 30 ans de recherche en biologie, écologie et génétique des
populations. Il invite à repenser globalement et dans toute sa
complexité la diversité des êtres vivants qui nous semblait familière.
Après
trois siècles d’inventaire systématique et 1.7 millions d’espèces
recensées, on a pensé jusque dans les années 1960 avoir une bonne
vision de la diversité biologique. On sait aujourd’hui qu’il n’en est
rien. Si certains groupes comme les plantes ou les vertébrés sont bien
connus, d’autres ont à peine été étudiés. On estime aujourd’hui par des
méthodes indirectes le nombre d’espèces vivantes entre 10 et 100
millions. Ce qui frappe donc c’est l’immensité de la diversité des
espèces et la faible connaissance que nous en avons.
Le
concept de biodiversité invite également à penser toute la complexité
du vivant. En effet, la diversité biologique ne se réduit pas à la
diversité des espèces. La diversité des individus au sein d’une même
espèce (diversité intra-spécifique) a pu être étudiée grâce au progrès
de la biologie moléculaire et de la génétique. Elle apparaît
aujourd’hui comme une grande richesse et un élément essentiel de la
pérennité des populations. Au-delà des espèces et des individus
considérés séparément, il convient également de s’intéresser à leurs
relations et interdépendances. Les écosystèmes apparaissent ainsi non
pas comme la juxtaposition d’espèces indépendantes mais bien comme des
ensembles aux caractéristiques uniques nées des interactions et
coadaptation des espèces qui les composent. Cette diversité des
écosystèmes (ou diversité supra spécifique) doit également être prise
en compte. Ces 3 niveaux étant imbriqués, il est impératif de les
prendre en compte simultanément.
Les progrès de notre
connaissance du vivant ont également conduit à une vision beaucoup plus
dynamique de la biodiversité. On a en effet longtemps privilégié l’idée
de stabilité ou d’état d’équilibre des écosystèmes en l’absence de
perturbations. On sait aujourd’hui que les écosystèmes et les espèces
sont en évolution constantes et que certaines perturbations (par
exemple les crues ou les tempêtes mais aussi l’élevage ou la
sylviculture) jouent un rôle essentiel pour la préservation de la
diversité biologique. Il ne s’agit donc pas de soustraire les espèces
et les écosystèmes à toute perturbation pour les maintenir dans un
hypothétique état d’équilibre mais bien de s’intéresser à leur
trajectoire d’évolution en maintenant des conditions favorables et en
préservant leurs capacités d’adaptation.
1. Christophe BILIC le 18-11-2008 à 15:13:25
Une petite réaction pour dire que la trame verte et bleue pourrait être mise en oeuvre rapidement. Il me semble qu'il appartiendrait à l'UE de définir un schéma que chaque Etat devrait décliner sur son territoire. Nous y parvenons bien pour les les gazoducs... En France cela pourrait prendre la forme de servitudes d'utilité publique. Les différents maîtres d'ouvrage de SCoT (document d'urbanisme intercommunal) pourraient ensuite se coordonner sous le patronage des régions pour traduire ces servitudes dans les règlements.
et une petique question : est-il souhaitable de mettre en relation toutes les espèces ? cela pourrait créer certains déséquilibres... at-on des études là-dessus ?
L'Hexagone devrait respecter le protocole de Kyoto. Mais il reste loin derrière ses voisins dans de nombreux autres domaines. En matière d'énergies renouvelables ou de fiscalité verte, par exemple.
En matière de développement durable, comment situer la France vis-à-vis de ses voisins européens et des autres pays développés ? Impossible de répondre d'une manière simple à cette question en la plaçant sur un podium ou en queue de peloton. Tout dépend des indicateurs et des sujets. Grâce au nucléaire, l'Hexagone a des émissions de CO2 rapportées à son produit intérieur brut (PIB) parmi les plus faibles d'Europe, et il devrait être l'un des cinq pays européens à atteindre les objectifs fixés lors du protocole de Kyoto. Mais cette bonne performance a un revers: la surproduction nucléaire a découragé pendant longtemps les investissements dans les économies d'énergie et dans les énergies renouvelables, deux secteurs où la France fait largement moins bien que la moyenne de ses voisins.
Dans le domaine de la santé, elle arrive première dans le classement de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Mais elle est également dans le peloton de tête pour le nombre de cancers par habitant en Europe, dont 8 % à 20 % s'expliquent par des facteurs liés à l'environnement. Des tendances contradictoires que l'on retrouve aussi du côté des entreprises, si tant est que la notion d'entreprise française ait encore un sens lorsqu'on parle des géants du CAC 40... Les constructeurs automobiles français ont ainsi les taux d'émission de CO2 par véhicule les plus faibles en Europe, car ils sont bien positionnés sur le marché des petites citadines. Inversement, les banques françaises sont largement à la traîne lorsqu'on compare leurs engagements en matière de responsabilité sociale et environnementale à ceux de leurs homologues étrangères.
Que disent les évolutions les plus récentes ? Depuis que le développement durable semble être devenu un objectif partagé par les grandes entreprises et les partis de gouvernement, la situation évolue-t-elle dans le bon sens ? Quelques signaux montrent un début d'inflexion: les rejets industriels dans l'eau et l'air ont considérablement diminué grâce aux normes adoptées dans les années 80. Les zones couvertes par des dispositifs de protection de la biodiversité n'ont jamais été aussi nombreuses. Dans les grandes agglomérations qui ont investi dans les transports en commun, comme Lille, Lyon ou Reims, la part de la voiture dans les déplacements recule, preuve que cette politique est efficace.
Par ailleurs, depuis 2004, la quantité de CO2 émise par les transports diminue, signe que l'augmentation du prix du pétrole couplée aux progrès techniques peuvent être efficaces. Dans l'industrie, la hausse du prix de l'énergie et le système européen de quotas d'émissions ont incité les entreprises à investir dans l'efficacité énergétique. Elles utilisent donc aujourd'hui moins d'énergie en valeur absolue qu'en 1996 pour produire davantage de richesses.
Mais ces résultats sont totalement insuffisants si on les ramène par exemple à l'objectif proposé par le Giec (le groupe de scientifiques spécialistes du climat qui a reçu le prix Nobel de la paix en 2007), et adopté formellement par la France en 2005, de diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2050 au regard de leur niveau de 1990. Cet objectif, dit "Facteur 4", est considéré comme indispensable pour contenir l'évolution du climat dans un plafond de + 2 degrés, niveau dont les conséquences sont jugées maîtrisables par le Giec. A cette aune, nous n'avions fait en 2006 qu'un tiers du chemin nécessaire puisque nos émissions étaient inférieures de 4 points aux objectifs de Kyoto, mais supérieures de 7 points au scénario Facteur 4.
Dans ce contexte, comment faire mieux ? Tout d'abord, en prenant exemple sur les bonnes pratiques de nos voisins. Ainsi, l'Allemagne recycle 68 % de ses déchets municipaux, quand nous nous contentons de 32 %; la part de l'agriculture biologique atteint 11 % en Autriche (contre 2 % en France), grâce à une politique de soutien à la conversion que rien ne nous empêche de mettre en place; le Danemark a instauré une taxe sur l'ensemble des consommations de carbone et est devenu ainsi le pays où la part de la fiscalité verte dans l'ensemble de la fiscalité est la plus importante d'Europe, ce qui n'est sans doute pas étranger à ses bons résultats en matière d'isolation des logements ou d'efficacité énergétique de son PIB. Pour autant, il n'existe, malheureusement, pas de modèle à suivre car aucun pays européen n'a une empreinte écologique jugée soutenable dans le long terme.
Pour que chacun puisse participer de manière mieux informée au débat public, un nouvel Alternatives Economiques Pratique vient de paraître sur "L'Etat du développement durable en France". En douze chapitres thématiques (climat, transports, énergie, consommation...) et plus de 150 graphiques, cartes et tableaux commentés, ce guide permet de savoir où en est la France et de la situer vis-à-vis de ses voisins européens.
Parler du développement durable dans un pays donné a-t-il un sens quand il s'agit d'une question globale par excellence ? De nombreuses politiques publiques relèvent déjà du niveau européen et international, comme le marché du CO2. Pour autant, ce qui se fait en France peut avoir un impact mondial.
De plus, nombre de sujets clés pour le développement durable, tels que la lutte contre l'étalement urbain ou la prévention des cancers liés à l'environnement, relèvent encore principalement du cadre national. La mondialisation des enjeux ne peut donc pas être une excuse pour ne pas exercer au mieux localement cette responsabilité centrale pour notre avenir individuel et collectif.
Pour faire mieux qu'aujourd'hui, la France doit jouer sur les trois leviers que sont la responsabilité individuelle, l'offre des entreprises et les politiques publiques. La production d'un kilogramme de veau engendre douze fois plus d'effet de serre que celle d'un kilogramme d'oeufs, et la production de blé bio 85 % de moins d'effet de serre que du blé conventionnel. Nos choix quotidiens de consommation ont donc bien un impact sur le climat, et ils ne peuvent (ni ne doivent) être dictés par les pouvoirs publics. Ils relèvent d'abord de notre responsabilité personnelle.
Dans son projet de loi de «mobilisation nationale pour le logement», Christine Boutin avait prévu de vider le dispositif SRU de sa substance, en comptant dans le quota des 20 % les logements en accession sociale à la propriété. Une fourberie qui aurait permis aux maires réfractaires aux HLM d’éviter d’en construire, en lançant à la place des opérations d’accession à la propriété. C’est ce qu’a refusé le Sénat.
Dans le compromis trouvé, le quota de 20 % de HLM devant être atteint par toutes les villes demeure donc intact. Cela revient à admettre que chaque commune doit contribuer à l’effort de solidarité nationale, en logeant des ménages modestes ou en difficulté. Contrairement aux dires de Christine Boutin, tout le monde n’a pas les moyens d’accéder à la propriété, à commencer par les 7,1 millions d’habitants de l’Hexagone qui vivent en dessous du seuil de pauvreté (817 euros par mois pour une personne seule), et représentent 12,6 % de la population. Sans compter les familles qui vivent avec des revenus à peine supérieurs. 1,3 million de ménages sont inscrits aux fichiers des demandeurs de HLM. Le logement locatif aux loyers abordables se révèle une nécessité dans les grandes agglomérations, où le parc du privé est inabordable aux revenus modestes. L’arrangement trouvé stipule donc que les pénalités financières des communes qui n’atteignent pas le quota seront diminuées. Ces dernières peuvent échapper aux pénalités en lançant des programmes d’accession sociale à la propriété. Pour Thierry Repentin, sénateur (PS) de Savoie «la minoration de l’amende est une porte de sortie pour les maires qui ne veulent pas de logement locatif social dans leur commune». Ce que ne nient pas des élus UMP. Après le désaveu du Sénat de Christine Boutin, le débat à l’Assemblée nationale sur la loi SRU promet d’être animé.
(1) La loi SRU impose aux villes de plus de 3 500 habitants (1 500 en Ile-de-France) un quota de 20 % de HLM. Celles qui sont en dessous doivent payer des pénalités financières.
Par Vincent Olivier, mis à jour le 29/10/2008 16:33 - publié le 29/10/2008 16:33
A l'occasion du Sommet mondial des régions, trois questions à Christophe Nuttal, du Programme des Nations unies pour le développement, sur ce que peuvent faire les pays du Sud pour lutter dans "la vraie vie" contre le réchauffement.
100 régions du Nord et du Sud, 5 continents, deux jours de colloques: le premier Sommet mondial des régions consacré au réchauffement climatique se déroule ces 29 et 30 octobre à Saint-Malo. Ouvert par Nicolas Hulot et Jean-Yves le Drian, président de la région Bretagne, il accueillera notamment le climatologue Jean Jouzel et Cécile Molinier, la directrice du PNUD (Programme des Nations unies pour le développement). Trois questions à Christophe Nuttal, directeur des partenariats innovants au sein du PNUD, et qui interviendra lors d'un atelier thématique le jeudi 30 octobre.
En quoi les régions peuvent-elles jouer un rôle dans la lutte contre le réchauffement climatique?
Lors du premier sommet de la terre à Rio, en 1992, on parlait beaucoup des ONG (Organisations non gouvernementales) et de leur capacité à faire avancer cette lutte. Au tout début des années 2000, ce furent plutôt les entreprises du secteur privé qui bénéficièrent d'une certaine reconnaissance de leur rôle.
Depuis, on s'est rendu compte que tout ne se jouait pas à l'échelon local ou national, voire multinational. Entre les deux, un échelon a parfaitement sa place: la région. Etant entendu qu'il n'est pas question d'agir au détriment de l'Etat, mais de prolonger l'action de l'Etat. Voilà pourquoi l'ONU soutient ce Sommet des régions.
De nombreuses régions des pays en voie de développement participent à ce sommet. Que peuvent-elles en attendre?
Il y a 11 ans, durant le sommet de Tokyo, les pays du Nord et du Sud s'étaient beaucoup affrontés pour savoir qui étaient les premiers responsables du changement climatique, chacun accusant son voisin. Or, que constate-t-on en 2008? Qu'une grande partie des fonds disponibles liés aux MDP [mécanismes de développement propre, système complexe de reversements entre pays riches et pauvres, qui permet à ces derniers de bénéficier de subventions] sont récupérés par les plus grands des pays "pauvres": Chine, Inde, Mexique, Corée, Brésil...
Les pays les moins développés doivent aussi en bénéficier. En Afrique par exemple, si une collectivité territoriale veut créer une centrale électrique, et qu'elle souhaite investir dans une centrale écologiquement "propre" (éolien, photovoltaïque...), il est souhaitable qu'elle ait recours à ces MDP pour en financer le surcoût.
Ne craignez-vous pas que la crise économique actuelle vienne contrecarrer ces bonnes intentions?
Ce serait une grave erreur! Si l'on n'y prend garde, cette crise économique sera tout autant, à terme, énergétique, climatique et donc écologique. D'ailleurs, à ne voir que le côté financier des problèmes, à y consacrer des milliards et des milliards d'euros, on oublie que, dans "la vraie vie", les difficultés perdurent sur le terrain. Le réchauffement climatique n'attendra pas qu'on veuille s'intéresser à lui pour faire parler...
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